Après 14 ans à la tête de la Commission des Champs-Elysées, Jean-Noël Reinhardt a annoncé ce week-end qu’il quittait son poste. C’est à la nouvelle équipe d’entamer la rénovation de l’avenue mythique qui fait encore rêver le monde entier.
Le grand patron des Champs-Elysées, Jean-Noël Reinhardt, l’a annoncé à son équipe ce week-end. Il a démissionné de la tête de la Commission des Champs-Elysées. À près de 70 ans, il préfère laisser à un futur président le soin de travailler sur le plan de rénovation élaboré de l’avenue, qu’il a décrit.
Quatorze ans après votre arrivée à la tête du comité des Champs-Elysées, pourquoi vous rendez-vous?
JEAN-NOEL REINHARDT. Je démissionnerai lors de la réunion du conseil d’administration le 16 juin. J’ai été élu en 2007 alors que j’étais président de Virgin. J’ai été réélu en 2012 et 2017 jusqu’en juin 2022. Mais dans un mois j’aurai 70 ans. Je pense que j’ai eu mon temps. C’est à la nouvelle équipe de lancer la suite.
Le moment semble-t-il mal choisi où tout doit encore arriver?
Le comité est une association vieille de 104 ans qui regroupe les habitants de l’avenue. En 2007, il y avait 80 membres. Nous sommes maintenant 180. Quand je suis entré au comité, c’était une association de commerçants. Aujourd’hui, elle est devenue une association de tous les acteurs majeurs de l’Avenue, de toutes les institutions culturelles, de tous les musées, de tous les théâtres, de tous les grands propriétaires et entreprises. C’est la synthèse du bien commun. Avec un conseil d’administration d’une vingtaine de membres dans lequel mon successeur peut facilement être trouvé, je pars avec la sérénité de quelqu’un qui a fait le travail.
Quelles conclusions tirez-vous de ces 14 années?
Nous sommes devenus l’interlocuteur de toutes les autorités de tutelle: arrondissement, ville de Paris et état en ce qui concerne les Champs. Deuxième point: nous avons reformulé une vision de l’avenue pour les décennies à venir avec notre projet Réenchanter les Champs-Elysées.
N’avez-vous pas dépassé vos compétences en proposant à la ville un projet pharaonique de 150 millions d’euros?
Je suis content que nous ayons répondu à une question à laquelle personne n’avait répondu jusqu’à présent. Lorsque nous avons lancé notre première conférence en 2014 avec Jean-Paul Viguier, grand architecte et urbaniste, sur une projection de l’avenir des Champs-Elysées, selon l’équipe municipale de l’époque, c’était aux commerçants de payer. En 2021, la ville a adhéré à notre vision qui préconise de revenir à l’essentiel, de créer une fluidité entre le jardin des Tuileries et l’avenue, de rendre les Champs plus verts et d’en faire une promenade agréable.
L’avenue des Champs-Elysées est-elle toujours la plus belle du monde dans sa forme actuelle?
Personne ne m’a jamais entendu dire cela. Mais c’est certainement une route mythique qui fait rêver les gens du monde entier. Il est chargé de trois siècles d’histoire. Mais nous voyons en fait que ce mythe est supérieur à la réalité. Il faut donc revenir à la hauteur de ce rêve perdu depuis des décennies.
Espérez-vous que tout ou partie de l’avenue retrouve son éclat?
Le travail d’étude que nous avons effectué a duré deux ans. Nous avons organisé une exposition dans le pavillon Arsenal. Et 100 000 Parisiens ont exprimé leur point de vue sur ce que devraient être les Champs lors d’une consultation populaire. Je ne peux pas imaginer que les élus, le maire de Paris, ne puissent pas emprunter une voie louée sur ce point. Cela ne fait aucun doute pour moi. Emmanuel Grégoire, premier adjoint d’Anne Hidalgo, en charge de l’urbanisme et maire, a évoqué ce projet qui durera 7 à 8 ans. Le bas des Champs sera réaménagé par les Jeux Olympiques de 2024. La plupart des travaux sur le dessus commenceront à la fin de 2024.
Et qui paie?
La planification de l’espace public relève de la responsabilité des communautés. Nous avons financé une étude qui a coûté 1 million d’euros. Si la ville nous demande de l’aider, nous serons ravis.

Le luxe a envahi l’avenue. Comment évaluez-vous cette évolution?
L’offre Champs n’est pas du luxe, mais du premium: c’est-à-dire des grandes marques françaises, européennes ou mondiales, venant chercher un emploi et proposant le meilleur du monde. Il y a Apple. Il y a Nike qui a fait son plus grand produit phare, Pierre Hermé, bientôt Lacoste. Ce sont des marques emblématiques. Le luxe ne représente que dix adresses des 90 magasins. La génération Y, ces jeunes de moins de 30 ans, originaires d’Europe, d’Asie, d’Amérique du Sud ou des pays de l’Est, viennent ici. Parce que c’est leur univers. Pour toutes ces marques, c’est une clientèle supplémentaire.
Mais les Parisiens désertent …
Il y a trois développements majeurs. Dans les années 1980, l’arrivée du GEN a permis de venir de partout. En 1993, Jacques Chirac, le maire de l’époque, élargit les trottoirs en supprimant la ruelle arrière. Le trafic piétonnier décuple soudainement. Enfin, le développement des compagnies aériennes à bas prix a attiré des visiteurs du monde entier. Les Parisiens ont alors quitté l’avenue. Notre projet est de tout mettre en œuvre pour que les Parisiens reprennent possession des Champs-Elysées, car ce sera un lieu préservé et verdoyant où ils se sentiront bien.
Les Champs ont été au centre de nombreuses crises, comme celle des gilets jaunes. Les images ont parcouru le monde. Pouvons-nous leur faire oublier?
Nous devons assumer la responsabilité de notre histoire. Les Champs-Elysées sont le lieu de la fête: de la libération, de la victoire de la Coupe du monde, et chaque année 500 000 à 600 000 personnes célèbrent avec joie le passage à la nouvelle année. Et là, les gens sont venus montrer leur colère. Mais ils ont fait une erreur: ils pensaient venir chez les riches. Mais les Champs sont extrêmement populaires.
La crise Covid a peut-être frappé plus ici qu’ailleurs. Voyez-vous le réveil?
Depuis cinq ans, l’avenue est durement touchée par les attentats de 2015, les gilets jaunes depuis 18 mois et la crise Covid depuis 15 mois. Les Champs ont pris les coups. Et en même temps, il y a un mouvement profond: l’attrait pour ce lieu a grandi. Tout le travail que vous voyez aujourd’hui le prouve. C’est la préparation à l’accélération du passage vers le marché supérieur dans les années à venir. Le matériel de récupération s’ouvre. Tant Dior que Yves Saint-Laurent ouvrent leurs portes sur des centaines de m2. Louis Vuitton va refaire sa boutique. Les Galeries Lafayette sont ici. Lacoste arrive dans un grand magasin. Tous les propriétaires modernisent leur outil commercial pour offrir un confort d’utilisation aux grandes marques mondiales.
Quel est votre souhait le plus cher pour la performance de votre successeur?
Après le temps des études et de la préparation, j’espère que maintenant un nouveau président lancera avec succès le nouveau cycle de transformation des Champs-Elysées, qui durera dix ans.
Les dix temps forts de son mandat
2007. Les LED sont introduites dans l’éclairage des Champs-Elysées “et la consommation d’électricité est réduite de 90%”, précise Jean-Noël Reinhardt.
2008. Premier marché de Noël sur les Champs, ouvert depuis six ans “et amenant 10 millions de personnes au pied des Champs”.
11 août 2009. Les Champs-Elysées sont classés comme une zone touristique internationale, tous les commerces sont donc ouverts le dimanche.
2010. Organisation avec la capitale de la nature Gad Weil “à travers laquelle les Parisiens peuvent accéder à un grand jardin de l’avenue”.
2014. Première édition, avec la ville de Paris, des fêtes de fin d’année “avec 500 000 à 600 000 Parisiens”.
2015. Première zone piétonne du dimanche, “avec l’appropriation renouvelée par les Parisiens”.
2016. Premiers événements du dimanche piéton: la course de drones, le défilé de L’Oréal
20 avril 2017. Xavier Jugélé, le policier assassiné sur les Champs-Elysées, a marqué l’histoire de l’avenue. “Cela nous a fait beaucoup de mal.”
2018. Les gilets jaunes attaquent l’avenue.
2020. 100000 Parisiens et habitants d’Ile-de-France donnent leur vision de ce que devraient être les Champs après les conférences “ Reenchanting the Champs ” en 2007 et 2019, animées à partir des travaux de Philippe Chiambaretta, grand architecte qui pense à la ville de demain. “
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Ref. : leparisien.fr